Avec les catastrophes génocidaires et leur projet négateur de l'appartenance humaine des victimes, dont la Shoah a constitué la figure emblématique, le vingtième siècle a marqué une rupture dans la culture. "L'écroulement de ce qui assurait à chacun, à son insu, inconsciemment, la certitude d'un pacte entre l'homme et lui-même, et les autres, cet écroulement a eu lieu, quelles que soient nos forces de dénégation".
Dans la perspective ouverte par Freud avec Malaise dans la culture, Nathalie Zaltzman a pris acte de l'absolue nécessité de repenser le travail de la culture, qui s'accomplit par le "psychique dans l'individuel". Le travail de la culture, consistant à rendre (partiellement) pensable ce qui indissociablement anime le sujet, le dépasse et lui échappe, est au cœur du travail de la cure. Cette posture théorique novatrice procède de l'invention en 1979 du concept de "pulsion anarchiste", qui a fait date dans le champ psychanalytique, tant au plan national qu'international, et participait d'une critique de la tendance des analystes à ramener toute conflictualité psychique au couple sexuel / narcissique.
Il s'agit de prolonger la théorisation freudienne de la pulsion de mort, en l'enrichissant d'une variante au service de la (sur)vie. Nathalie Zaltzman repense ainsi l'articulation narcissisme individuel / narcissisme collectif et dessine une approche de la négativité, au-delà de l'auto-destructivité narcissique de type mélancolique ou de la haine de la culture suscitée par l'exigence collective de sacrifices pulsionnels. Dans cette perspective, l'espace culturel apparaît irrémédiablement traversé par une lutte entre le travail de la culture comme prise de conscience transformatrice du négatif et la régression (auto)-destructrice, agglomérant dans la masse l'individuel et le collectif.
Ce colloque, ouvert aux psychanalystes comme à tous les auditeurs curieux, visera à faire comprendre la place aujourd'hui décisive de cette œuvre. Elle vient témoigner de l'importance vitale tout à la fois de la psychanalyse pour penser la puissance bivalente des processus culturels et de ce travail de pensée pour maintenir la puissance thérapeutique et scientifique de la psychanalyse.
CALENDRIER PROVISOIRE :
Lundi 19 août
Après-midi ACCUEIL DES PARTICIPANTS
Soirée
Présentation du Centre, des colloques et des participants
Après-midi
Geneviève BRISAC (écrivain) : Carte blanche
Soirée
Débat autour d'un texte inédit de Janine Altounian : "Rupture et discontinuité au service de la survie ou du lien"
Mercredi 21 août
Matin Catherine MATHA : Souffrir maintenant et indéfiniment : une maladie trop humaine Raphaël MINJARD : Du chaos à la pulsion anarchiste : l'antre de l'éveil
Après-midi Jean-Pierre PINEL : Les alliances inconscientes psychopathiques, une figure du Mal Evelyne TYSEBAERT : Le mal. Ses représentations entre corps individuel et corps du monde
Jeudi 22 août
Matin Georges GAILLARD :Travail de culture et rencontre avec "les figures intimes de la barbarie" Gaia BARBIERI : Valeur subversive de Thànatos dans l'accompagnement clinique des sujets migrants
Après-midi Ghyslain LÉVY : Les émissaires de l'ailleurs Noémie DURR : La rencontre d'un sujet hors héritage, étranger en lui-même
Samedi 24 août
Matin Barbara DE ROSA : Nathalie Zaltzman et l'enjeu du Kulturarbeit dans la rencontre entre témoignage et écoute Aline COHEN DE LARA : Déliaison de vie ?
Après-midi François VILLA : Psyché anarchiste, psyché totalitaire ? Isabelle LASVERGNAS : La pulsion anarchiste : pour un retour vers une métasociologie psychanalytique
Dimanche 25 août
Matin Ellen CORIN : Pouvoirs et risques de la déliaison. Parcours aux limites Christian FERRIÉ : Destins collectifs de la pulsion anarchiste (des rois de Thulé aux chefferies tupi-guarani)
Après-midi Marie-Françoise LAVAL-HYGONENQ : Pulsion anarchiste, pulsion de mort, paradoxes de l'autoconservation Arlette LECOQ : Entre l'esprit du mal et la vie de l'esprit, d'Angkar à Angkor