Expertise du phylactère par Davit Ghazaryan, chercheur spécialisé dans les manuscrits anciens au Matenadaram Museum.
Archéologie d'un des plus longs phylactères de l'histoire daté de 1865 :
La redécouverte de cet héritage et le début de l'aventure a commencé à Paris en 2016. Le 21 juin, à la Maison des étudiants arméniens de Paris, démarre un travail de recensement conduit par Davit Ghazaryan, chercheur spécialisé dans les manuscrits anciens au Matenadaram Museum, sollicité par Janine Altounian sur les conseils de Varvara Basmadjian et de Mikaël Nichanian pour expertiser et faire un sort à ce rouleau précieux reçu en héritage. Le Matenadaran ou Institut Machtots de recherches sur les manuscrits anciens est l'un des plus riches dépôts de manuscrits et de documents au monde. Situé à Erevan, la capitale arménienne, il compte plus de 17 000 manuscrits et environ 300 000 documents d'archives.
Dans cet ouvrage publié aux Puf, qui recourt à l’autobiographie et à la psychanalyse, Janine Altounian témoigne de son expérience d’analysante singulière, ayant travaillé d’une part à la traduction des survivants à un génocide aux lieux effacés, d’autre part à celle des Œuvres complètes de Freud sous la direction de Jean Laplanche, en tant que responsable de l’harmonisation dans l’équipe de révision. La chronologie de cette entreprise éditoriale de longue haleine a été livrée lors de la Cérémonie d’achèvement de la traduction des Œuvres complètes de Freud qui a eu lieu le 4 novembre 2015
Cherchant à traduire les traces de la disparition d’une culture et de ses lieux afin d’en inscrire l’effacement, elle décline les conditions de cette traduction selon trois perspectives :
– Une expérience d’effacement demande à être traduite dans la langue de l’autre pour s’inscrire dans le monde.
– C’est par ce travail de traduction que les héritiers d’un crime de masse peuvent subjectiver et transmettre leur histoire.
– Ce travail de traduction requiert plusieurs générations avant que ce qui a pu être « traduit » au « pays d’accueil » s’inscrive dans le champ culturel et politique de celui-ci.
Parution en Turquie aux éditions Aras Yayıncılık du Journal de déportation de Vahram Altounian, écrit en 1920 à Lyon et publié enfin en 2015 en turc dans ce qui fut son pays : Geri Dönüşü Yok, Bir Babanın Güncesinde ve Kızının Belleğinde Ermeni Soykırımı, Vahram ve Janine Altounian, "Sans retour possible, le génocide arménien dans le journal d'un père et la mémoire de sa fille". Geri Dönüşü Yok, 1915 yazında ailesiyle birlikte Bursa’dan Suriye çöllerine doğru bir ölüm yolculuğuna çıkarılan on dört yaşındaki Vahram’ın, felaket yıllarının hemen ardından kaleme aldığı güncesinin üzerine temelleniyor.
Kitap, babasının defterini saklı kaldığı çekmecede onyıllar sonra keşfederek gün yüzüne çıkaran yazar Janine Altounian ile dilbilim ve psikanaliz uzmanları Krikor Beledian, Régine Waintrater ve René Kaës’in günceyi dilbilimsel, tarihsel ve psikanalitik açıdan ele aldıkları beş makaleyi de bir araya getiriyor.
Le parcours analytique esquissé ici cherche à témoigner de ce qui s'est transmis aux descendants des survivants, tous disparus à présent, du génocide arménien de 1915, nié par l'Etat turc. Aboutissant à la réappropriation de cette transmission, il peut être lu comme un cas clinique intéressant les psychanalystes et les héritiers des catastrophes historiques.
Entretien avec Janine Altounian sur France Culture - Journal de la philosophie
L'excipit du livre : Zépur, le témoignage d'une rescapée
L'ouvrage se termine par la transcription de l’entretien de Zépur Mezbakian, rescapée du génocide des Arméniens, diffusé sur France inter dans Là bas si j'y suis de Daniel Mermet le 11 mai 2005. Cet entretien d’une survivante, semblable aux « grands mères de son enfance », a été intégralement retranscrit par Janine Altounian dans le dernier chapitre du livre. Rare témoignage oral d’une expérience de ce qui a pu se vivre pendant la déportation des Arméniens vers les déserts de la mort, il constitue à ce titre un socle fondamental et emblématique de toute la réflexion de l’auteur sur l’héritage de cette transmission.
Ce livre illustre à l’aide d’exemples personnels le rapport existant entre le travail de la cure et celui de l’écriture lors de l’élaboration d’un héritage traumatique.
Cet ouvrage à plusieurs voix porte sur la question de la transmission d’un héritage traumatique et de son mode d’élaboration au cours du travail analytique. Il a la particularité de comporter, en fac simile, le manuscrit original du témoignage autour duquel il s’origine et s’organise : le Journal de déportation de Vahram Altounian, traduit par Krikor Beledian, reçu et commenté par Janine Altounian, essayiste, traductrice. Le texte intégral de cet ouvrage, dont le témoignage de Vahram à partir de la page 13 (y compris les pages en arménien du fac simile) est disponible sur le site de Mélik Ohanian, où vous pouvez voir comment le jeune plasticien et artiste (sur la photo à gauche avec Janine Altounian) a créé son objet d’exposition visible sur le site du CRAC de Sète,
au Centre régional d'Art Contemporain du Languedoc-Roussillon en détruisant 120 exemplaires de mon livre collectif Mémoires du génocide arménien, Héritage traumatique et travail analytique. Krikor Beledian, chercheur et traducteur du Journal de Déportation de Vahram Altounian l'a complété par un addendum qui prend tout son sens à la page 41 du journal.
Photo : Vahram Altounian et sa mère Nahidé à Istanbul vers 1919
Cet ouvrage se propose de montrer comment, à partir d’un écrit indéchiffrable pour tout lecteur néophyte, une expérience traumatique débutant à Boursa, petite ville d’Asie mineure, un « mercredi 10 août 1915 », passe par l’épreuve de sa traduction, celle de sa réception et de son élaboration subjective par un héritier pour se transmettre et aboutir, quasi un siècle plus tard, à la présente publication.
Photo : Vahram en berger comme chez les Bédouins, Istanbul 1919. La mise en scène de cette tenue rappelle sans doute que la survie de Vahram doit beaucoup auberger arabe qui l'avait accueilli penddant la déportation en 1915 ou au début de 1916 dans le désert de Syrie, non loin de l'Euphrate.
Cette photo a été faite dans le même studio que celui de la précédente où Vahram pose avec sa mère.
Elle correspond au rite de la photo "déguisée" en vogue dans la culture ottomane qui aime jouer avec les identités. On peut lire à ce sujet l'ouvrage de Catherine PINGUET qui porte sur les premiers photographes de Constantinople, notamment les Frères Abdullah, des Arméniens qui sont aussi les premiers photographes officiels de sultans : Istanbul, photographes et sultans, CNRS éditions, 2011, collection Pierre de Gigord.
Tra i tanti massacri e genocidi che tristemente si sono succeduti nel secolo appena concluso, quello del popolo armeno ha forse avuto un risvolto drammatico in più: è stato negato, cancellato, coperto dall’oblio. Negli ultimi anni, però, coloro che sono sopravvissuti, i loro figli o i loro nipoti, hanno iniziato un importante, faticoso e dolorosissimo lavoro di scavo per portare alla luce la memoria della tragedia.
L’ouvrage porte sur la douleur de l’empêchement à s’engager dans la tendresse que rencontre l’héritier d’une transmission traumatique chez son parent survivant. L’écriture constituera le truchement pour ressentir, en place de l’autre détruit, des affects excédant ses capacités psychiques. Elle vise à subjectiver une souffrance parentale encryptée dans le mutisme et tente de nommer les conséquences traumatiques des meurtres de masse sur les descendants de survivants.
Dans un cheminement apparemment inversé, une tentative de réflexions contemporaines au sein des récits ancestraux sera menée pour dessiner les différentes étapes d’une psychisation de longue haleine. La survie relève alors d’une capacité d’invention proprement artisanale, c’est-à-dire d’un savoir faire « avec des restes », la vie ultérieure ne pouvant se construire qu’avec la réintroduction du tiers anéanti lors de la terreur.